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 Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]

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Zatanna Zatara
Zatanna Zatara
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyMer 1 Avr - 17:19


Le moment est aussi particulier qu’inattendu. Rien, au réveil ce matin-là, n’aurait permis à Zatanna de deviner qu’au soir, elle serait dans cette situation, encore moins avec un parfait inconnu. Elle, si méfiante, si solitaire depuis la disparition de ses amis, elle qui a tenté d’être si forte, si insubmersible pour la jeune génération… Était finalement une image aussi friable qu’une statue de sable. En voulant se forcer à effacer ses propres besoins au profit de la communauté, en voulant effacer ses propres incertitudes, nier ses échecs, ses espoirs, ou même ses propres failles et faiblesses, elle s’est exposée comme jamais à la vulnérabilité… Celle de perdre le sens commun dès lors qu’on se montre un tant soit peu gentil avec elle. Être confrontée à trop de douleur, trop de monstruosité, trop d’égoïsme, pendant trop longtemps n’en fait briller qu’avec plus d’éclat la générosité, plus encore lorsqu’elle est désintéressée. D’ordinaire, la magicienne n’aurait pu que se méfier d’un tiers, et n’aurait sans doute pas eu de repos tant qu’elle n’aurait pas touché le fond de l’affaire, découvert qui était vraiment Mirror. Mais dans ce monde, plus rien n’est ordinaire, et cette situation ne déroge pas à la règle. Ce ne serait rien si, en même temps que de perdre son ordinaire, le monde n’avait pas perdu le peu de sécurité qu’il lui restait… Là, tout de suite, Mirror pourrait tout aussi bien être un danger ayant brouillé tous les radars de la magicienne, et, leur contact étant ce qu’il est, elle ne pourrait rien faire pour l’empêcher de la frapper…

Bien sûr, Zatanna est loin de se méfier de quoi que ce soit… Et là est sa plus grande vulnérabilité. Elle n’anticipe pas, là, parce qu’elle ne se figure pas devoir anticiper quoique ce soit. Bien plus que dans la réflexion, elle est perdue dans le ressenti. Le sien, en raison de sa douleur physique, mais surtout celui de Mirror, émotionnel, béant, qui lui fait l’effet d’être la même forteresse de glace imprenable qu’elle-même ne l’est, une forteresse aux murs dangereusement en train de se fendiller, et pourtant que la curiosité la pousse à gratter… Pas par plaisir malsain, mais parce que poussée par le désespoir de trouver un reflet à sa propre âme… Parce que si son âme est le reflet de la sienne, et qu’elle parvient à le considérer comme un humain, alors elle pourra, elle aussi, encore se considérer humaine. Au final, la magicienne n’est qu’une enfant perdue dans un monde de monstre, à la recherche de quelqu’un qui lui ressemblera. Elle n’a pas la moindre idée de la boîte de Pandore qu’elle est sur le point d’ouvrir, qu’elle est peut-être sur le point de faire pire que mieux, de détruire les derniers fragments de raison d’un homme… Qui finit, abrupte, par la rejeter.

Hébétée, ses bras demeurent dans le vide quelques secondes avant de retomber, après que Mirror se soit détaché d’elle. Elle le regarde, le voit bouleversé, sans comprendre, et ne peut que se demander ce qu’elle a fait de mal, quand est-ce que le point de non-retour a été franchi. Elle est désolée, bien sûr, de le voir dans cet état, mais ne sachant pas encore de quoi elle doit s’excuser, elle lui laisse le temps, ses sourcils se fronçant malgré tout d’inquiétude. Et puis… Et puis elle comprend. Elle entrevoit, il lui semble, le monstre qui le harcèle, qui l’écrase. La culpabilité. Cet homme, comprend Zatanna, est en deuil. Il est plein de colère, de peine… Elle baisse lentement les yeux. N’ayant pas assez d’éléments pour tout comprendre de sa situation, la magicienne peut seulement en appréhender la gravité. Relevant les yeux vers lui après son conseil, elle a envie de lui dire que les êtres comme lui et elle n’ont aucun impact dans la vie ou la mort, que la mort fauche sans distinction, sans raison, à l’aveugle. Nombreux sont les vivants qui mériteraient la morts, et les morts qui mériteraient la vie, mais qu’il n’appartient pas à eux d’en décider… Jamais, et que c’est un drame qu’elle porte depuis toujours, elle, capable de prodige, ne peut pourtant pas ramener les morts à la vie… Tout simplement parce que ce pouvoir n’est pas entre leurs mains, et n’est dans les mains de personne… Sauf de la mort elle-même.

De tout cela, Zatanna est intimement convaincue. Cela étant, Mirror, dans l’instant, a besoin de tout sauf de philosophie. Alors elle hoche simplement la tête en signe d’assentiment. « Je suis désolée pour vos pertes… » Elle murmure, du bout des lèvres, désarmante de sincérité… Et ça s’arrête là. Elle ne lui dira ni oui, ni non en réponse à son conseil. Elle fera comme elle a toujours fait : de son mieux. Relevant les yeux pour lui adresser un sourire discret, elle finit par poser les pieds au sol, et se redresser. Laissant le temps à Mirror de récupérer, elle rassemble ses affaires pour lui, la colle, le désinfectant, le fil, pour les ranger soigneusement dans son sac, le tout en boitillant légèrement en tournant autour du bureau.
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Jonathan Mills
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyMer 1 Avr - 21:02

Les choses auraient pu mieux se passer. Ou pire. Je ne pouvais pas craquer sur ce dénouement inattendu, cette part d’humanité et de faiblesse que j’avais pu retrouver et étreindre un moment. Mais je ne ressentais plus le besoin de m’apitoyer sur mon sort. Quelque part, quelque chose en moi s’en défendait maintenant violemment. Comme si ce n’était pas digne de moi, ou plutôt, pas justifié. Avec la certitude fichée dans le plus profond de ma gorge que tout ceci, tout ce qui était arrivé, c’était ma faute. J’avais la tête qui tournait. Je revoyais tout ce qui s’était passé. Tout. La migraine repointait encore le bout de son nez. Et les vertiges allèrent en s’aggravant. La faute de l’alcool ? Difficile à dire. La faute à l’étreinte ?


Non, pour ça comme pour le reste, la faute à moi, rien qu’à moi.


La jeune femme dit qu’elle est désolée pour mes pertes. Je perds encore le contrôle. Le cœur au bord des lèvres, qui palpite à une vitesse véritablement dingue. Je perds le souffle normalement maîtrisé de ma propre respiration. Je transpire. Abondamment. SPT ? Maladie chronique indétectable ?


Folie ?


Je sens mes mains autour de son cou. Je vois ma lame s’enfoncer entre ses côtes. Ma rafale découper ma cible. Je sens la chair qui se déchire, les os qui craquent. J’entends le crépitement du feu sur ma voiture. Sur la chair des trois femmes de ma vie. J’entends les hurlements déchirants de Jennifer, brûlée vive. Et la succession rapide de tous ces gens que j’avais tués dans ma vie. Le rythme est infernal ; il me donne le sentiment de tomber depuis l’espace, comme un poids mort qui ne finira que par éclabousser le monde de sang. Je me tiens la tête, passe mes mains dans mes cheveux, les ébouriffe alors que j’essaie de comprimer la migraine. Elle a dit qu’elle était désolée. Mais elle s’arrête alors qu’elle range mes affaires. J’inspire, ferme les yeux, m’agrippe à la table.



| Des pertes, tout le monde en a subi. |


Le soldat, le professionnel des SEALS reprenait le dessus. Je calmais ma respiration, nauséeux et migraineux à l’extrême. Fermant les yeux et les rouvrant, pupilles dilatées par intermittence, aveuglé par les flashs sensoriels de tout ce SPT qui me rendait barge. Je déglutis péniblement.


| Je… C’est quelque chose… Qui nous a changés, tous. Pas vrai ? Je pense que chez moi, c’était déjà là avant. Je ne sais pas quand ça a commencé. Qu’est ce qu’il fait soif ici, putain. |


Je me frottais la bouche, lèvres déshydratées déjà par l’alcool en cours de digestion. Mais j’en aurais voulu plus. Toujours plus.


| J’étais là-bas pour tuer quelqu’un. Quelqu’un qui ne m’avait rien fait. |


Je relève les yeux vers elle.


| Tout ça pour dire que je ne mérite pas votre compassion, Miss Daisy. |
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyJeu 2 Avr - 11:31


Il a l’air encore plus mal en point mentalement que physiquement… Elle le voit, Zatanna, elle voit Mirror au bout de sa vie, au bout de ce que son esprit pouvait supporter… Et elle compatit. Elle compatit et se peine, s’interpelle, s’insurge que des horreurs puissent à ce point déchirer une âme… Et elle se demande… Pourquoi pas la mienne ? Pourquoi est-ce qu’elle n’est pas dans le même état que ce type ? Qu’est-ce qui fait que, elle, supporte mieux cette pression ? Pourquoi certains tombent dans des abîmes insondables, sans plus jamais pouvoir s’en extirper, et d’autres continuent de flotter à la surface, envers et contre tout, contre vents et marées ? Elle voit bien que Mirror souffre le martyr… Mais elle n’est pas psychologue. Elle voit la détresse de son corps, ses sueurs, son regard fou… Elle se doute qu’il revit, au moins émotionnellement, un souvenir traumatisant… Et puisqu’il est ancien soldat, il doit en avoir à la pelle… Mais elle n’a pas la moindre idée de comment le calmer. Elle n’est pas psychologue, n’a pas de sédatif… Et sans doute pas la force de l’assommer d’un seul coup. Et puis, il lutte pour reprendre le contrôle, s’accroche à la table. Elle n’a pas le droit de l’empêcher de se reprendre. Elle se contente, dans un premier temps, de poser une main à peine perceptible sur son épaule, dans une tentative de réconfort, juste pour l’assurer qu’il n’est pas seul. Il ferme les yeux, semble lentement, petit à petit, reprendre le dessus. Quand il parle de pertes, elle hoche la tête, mais ne répond rien. Bien sûr que tout le monde a connu des pertes. Elle-même n’a jamais connu sa mère parce que des tiers en ont décidé autrement. Son père, qu’elle adorait, lui avait été arraché. Ses amis, ensuite, sa nouvelle famille, avait disparu. Ses pertes, elle n’a plus assez de doigts pour les compter… Et elle n’est pas la seule dans ce cas-là. Blocus ou pas, les hommes s’entretuent pour des motifs plus ou moins valables, et toujours totalement subjectifs. Elle-même, contrairement à Batman, estime que certaines morts prématurées soulageraient l’humanité. Pour autant, avant ce soir, elle ne s’était jamais résolue à joindre l’acte à ses convictions… Et sur ce cas très précis, si elle ne culpabilise pas (encore) de son geste, il n’en demeure pas moins qu’elle a assassiné quelqu’un.

Cette pensée lui fait l’effet d’une douche froide. Penser à ses propres pertes lui fait l’effet d’une douche froide. Mirror subit, subit à crever, le poids de sa culpabilité. Remet tout en question, cherche des racines dans sa vie d’avant à son comportement en zone occupée. Et Zatanna voit rouge. Elle serre le poing, pâlit plus encore si c’est possible. Et puis… Et puis il lui assène la vérité qu’elle ne voulait pas savoir. Elle ferme les yeux, inspire longuement… Et digère quelque chose qu’au fond, elle savait déjà. La colère est là, en elle, lui dévore l’estomac plutôt que de lui brûler la tête. Elle est froide, pleine d’amertume. Il s’en prend à elle, mais elle comprend bien que ce n’est pas personnel, que ça n’a absolument rien à voir avec elle… A bien y réfléchir, quand a-t-elle été au centre des préoccupations de qui que ce soit, depuis la disparition de son père ? Jamais. Zatanna, elle est toujours là, en périphérie des événements, des sentiments, mais jamais l’épicentre, jamais l’origine. Elle tente de son mieux de relever ce qu’elle peut, et s’occupe de ses affaires. On ne s’occupe pas d’elle, parce qu’elle est discrète, et ne demande, au final, jamais rien. Mais là, elle en a assez. Elle aussi a pris le tarif dans cette histoire. Elle aussi a des pertes. Elle a même manque de peu de se perdre elle-même, de finir sa vie condamnée dans les plumes d’un oiseau ! Quelqu’un pour la plaindre ? Pour compatir à son mal-être ? Ou pour ne serait-ce que simplement lui poser la question ? Non ! Elle est seule depuis presque deux ans, seule à devoir tenter ce qui pour elle est l’impossible, sans la possibilité d’avoir l’aide de qui que ce soit ! Alors elle en a assez de voir le monde s’apitoyer, de s’apitoyer sur le monde, quand elle-même n’a pas même une soirée à passer à se plaindre de son triste sort !

« Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise, Mirror ? » Elle demande, glaciale. « Que vous êtes un monstre ? » Elle sourit, jaune, amère. « Regardez-vous… ! » Venant prendre son masque dans son sac, elle le lui envoie, sans ménagement. « La culpabilité est déjà en train de totalement vous détruire… » Elle serre les poings, fronce les sourcils de colère. « Vous voulez que j’vous dise que vous êtes le pire des hommes ? » Elle rit à nouveau. « Désolée de vous décevoir, mais ce n’est pas le cas. Vous êtes sans doute un homme dangereux, et si vous voulez vous définir comme ça, parfait, c’est vous que ça regarde… Mais vous ne serez jamais qu’un petit joueur dans cet océan de requins… » Petit à petit, la colère prend le dessus. « J’ai côtoyé des monstres toute ma vie, Mirror… Contrairement à beaucoup, j’ai pu regarder les démons de l’Enfer dans les yeux… » A ces mots, ses yeux s’embuent. « Vous en êtes encore loin… Et votre âme, que vous déchirez à grands coups de couteau, ne sera pas épargnée en bas parce que vous vous serez torturé vous-même ici, je peux vous le promettre… Vos souffrances ne font que commencer, si vous vous obstinez dans cette voie. » Ses mâchoires se crispent. « Vous vous pensez si important pour avoir une influence sur la mort… ? A quel point peut-on à la fois être aussi détruit de culpabilité et bouffi d’orgueil ? » Elle secoue légèrement la tête, incrédule. « La mort prend et laisse ce qui lui plaît, comme il lui plaît, quand il lui plaît. Cancers, accidents de la route, tabac ou obésité… La vie n’est qu’un état transitoire. Dès que nous naissons, nous sommes des morts en sursis ! » Elle se renfrogne. « Vous contrôlez vos actes, pas leurs conséquences. Que vous la vouliez ou pas, vous avez ma compassion, Mirror… Vous êtes un humain détruit dans un environnement sans repères, sans point d’horizon. Je ne cautionne pas vos actes, mais je ne peux pas dire que je ne comprenne pas l’espèce humaine et ses limites… » Elle redresse le nez. « Continuez à vous blâmer, à vous flagellez si vous le voulez, mais ne comptez pas sur moi pour participer à cette séance de sadomasochisme… Quand vous voudrez être constructif, vous n’aurez qu’à m’appeler. » Et, ce disant, elle abandonne son sac et file s’asseoir en tailleur dans le couloir, pour faire le guet.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyJeu 2 Avr - 16:48

La compréhension, la compassion ou ses prémices, sont autant de choses qui me paraissent aujourd’hui insupportables. J’en suis au bord de la rupture ; je me tiens juste au-dessus du gouffre. Prêt à chanceler, et tomber. La jeune femme se fourvoie totalement sur le sens de mes paroles, sur ce que j’aurais pu attendre d’elle ; la vérité, c’est que je n’attendais rien. Mais que je ne méritais pas son soutien, et encore moins sa pitié. La pitié et la compassion, c’est bon de les nourrir quand quelqu’un est innocent. Autrement, ça ne sert à rien. C’est contre-productif. Ca va encore plus me faire vriller. Je laisse passer le fiel. Rattrape mon masque, dont le poids rassurant et la froideur de la matière me rassénèrent, comme s’il m’avait manqué quelque chose jusque là. Comme si c’était le doudou d’un gosse, ou plutôt le grigri d’un soldat. La belle est en colère. Elle fulmine. Elle croit que je désire être accablé. Non. Ce serait une forme d’égoïsme, d’instinct grégaire qui pousse à se faire plaindre, à faire l’objet de l’attention des gens. Non, elle se trompe.


Je ne suis pas égoïste. Je suis beaucoup de choses, mais sa pitié, sa compassion, sa reconnaissance, sont autant de données inutiles pour moi que la pluie et le beau temps. Je la laisse traverser son propre orage, qui la ramène à ses propres errements, à ses propres cauchemars éveillés.


Je sais déjà que je suis au-delà de toute rédemption. Ce qu’elle prend pour une complainte et un appel à l’aide ne sont qu’autant de symptômes d’un mal plus profond. J’écoute tout ce qu’elle a à me dire quand elle me balance que je suis bouffi d’orgueil. L’étais-je encore, au pays des dieux vivants et des héros immaculés ? Elle se trompait sur toute la ligne. Sur moi mais aussi sur le reste. Les héros n’étaient jamais que d’éphémères figures rassurantes pour tout le monde, dont les détails de leur réalité les rendaient tous aussi faibles et insupportables que le commun des gens. J’avais connu des figures de guerre, médaillées, qui avaient sauvé des tas de gens -et souvent tué beaucoup d’autres- dont la femme devait se maquiller pour ne pas arborer ses cocards, ou des pilotes de nuit en JSAF qui étaient les pires connasses égocentriques du monde.


Je sais quoi dire, moi, sur la mort. Je la côtoie depuis longtemps. Elle m’a refusé l’étreinte qui aurait dû m’emmener avec les miens. J’entends le ressac sensoriel, encore et encore, de ma fille qui brûle vive. De ma femme, visage éclaté sur le pare-brise. De l’autre petite, coincée et inanimée dans la portière.


Je la regarde se rhabiller. Sans gêne. Les soldats n’ont aucune pudeur, on vous l’annihile dans les douches collectives quand vous faites vos classes.


Incroyable ; elle a pris tout cela pour un appel à l’aide, dans cette pathétique attitude collective et moderne, où le héros n’est plus celui qui est vertueux mais celui qui souffre. Plus l’histoire est tragique, mieux c’est. Elle ne connaît rien de la mort, ni des gens. Du moins, pas de ceux qui se retrouvaient comme moi, entre-deux. Je ne suis pas un héros. Et je sais déjà à quoi je suis voué depuis des années, pour tout ce que j’ai fait.


Je la laisse sortir. Pourquoi l’en dissuader ? Je n’ai d’éloquence que pour d’autres tueurs, que pour remiser des portes-flingues à leur place, des types qui ont mon genre de moralité, qu’ils aient servi un drapeau ou aucun. Je n’ai jamais su sortir vainqueur d’une dispute avec ma femme ou mes filles, pas sans l’autorité militaire qu’elles-mêmes me prêtaient jusque dans l’intimité de notre famille.


Elle prend le premier tour de garde, donc. Je ne suis pas son père ; je ne vais pas vérifier si elle est endormie et si elle risque plus encore de soucis avec son éventuelle commotion. Je ne dors pas ; impossible de se reposer ici. Alors, je repasse en revue tout l’équipement dont je dispose, armes et lames, je nettoie tout, à fond. Et jette un coup d’œil sur les quais, plus bas. De l’activité, mais rien d’anormal. Le temps s’éternise. Je me rince la bouche avec la dernière rasade de ma propre flasque. Il me faut longtemps pour me calmer, et je reste longtemps à me boucher les oreilles, ou me fermer les yeux le plus fort possible dans une pathétique tentative de repousser tous ces souvenirs qui me faisaient gamberger. Et je contemple mon reflet dans mon masque pendant un long moment indéfini, avant de ressortir dans le couloir. Au bout d’une bonne heure, d’après ma montre. La nuit est déjà dans sa deuxième moitié. Arme au poing, chargée. Je regarde la jeune femme, et le couloir sens dessus-dessous.



| Je vais prendre le relais. Au bout de tout ce temps, votre attention va forcément se relâcher. Dans trois heures, le soleil sera levé. Les rues seront pleines et il est possible qu’ils contrôlent les visages. On partira dans une heure, alors. Leur périmètre de recherches sera sans doute déjà plus étendu que cette position, c’est le seul moment qu’on aura avant qu’ils ne rebroussent chemin et ne reviennent chercher après nous plus près, pour voir s’ils n’ont rien oublié. Ok pour vous ? |
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyVen 3 Avr - 17:51


Elle est furieuse, en arrivant dans le couloir, Zatanna. Elle en a marre de cette situation de merde, de ces comportements de merde, de devoir se battre tout le temps pour tout ! De rage, elle expédie son pied dans un reste de chaise, et l’envoie valser, se fracasser contre le mur, à l’autre bout du couloir, non sans, au passage, se faire un nouveau vilain bleu sur le tibias qui la fait grogner de douleur et de colère. Un pur coup de sang qui le fait battre douloureusement à ses tempes, tempes qu’elle ne peut pas masser… Plus que jamais, elle a envie de hurler. Tout ça commence à sérieusement la gonfler au-delà de l’admissible, et elle en vient à se demander si elle ne ferait pas mieux de noyer toute la Freedom Bay sous un raz-de-marée pour en finir une bonne fois pour toutes. Perclue de douleur, elle finit par venir s’adosser au mur, et s’y laisse glisser lentement, avec un sentiment qui lui semble proche de ce qu’elle ressentirait si elle abaissait un drapeau blanc. Elle a l’impression de se rendre, Zatanna, de baisser les bras, de renoncer, et cette perspective lui semble aussi insupportable qu’insurmontable… Qu’une fatalité. Ramenant ses genoux contre elle, les enfermant dans ses bras, elle tente de lutter contre la nausée qui l’assaille. Trop de peine, trop de déception, trop de douleur… Ce qui a été dix minutes une éclaircie dans ses travers ne s’est révélé être que l’œil du cyclone.

Il n’y a pas pire, pour la magicienne, que l’ascenseur émotif auquel elle vient d’être soumise. Pendant cinq minutes, sa triste solitude avait l’air de se dissiper, ne serait-ce qu’un peu. Pendant cinq minutes, elle a cru pouvoir boire à une oasis avant de retrouver le chemin impitoyable du désert. Mais non. Il n’y a plus rien de bien dans ce monde, plus rien à sauver. Elle n’en a plus la force en tous cas, plus le courage, plus l’envie, n’en voit plus l’intérêt. Ce douloureux constat la calme instantanément, et fait lourdement tomber la fatigue sur ses muscles, éprouvés par la douleur et le reste, ou bien les émotions délirantes en intensité et totalement aux antipodes les unes des autres à travers lesquelles elle est passée sur les dernières cinq minutes. Ses membres s’engourdissent, semblent peser une tonne de plus à chaque seconde qui passe, tout comme ses paupières, mais, si elles se ferment à plusieurs reprises en peinant à se relever, Zatanna ne s’endort pas. Elle n’y arrive pas, puisque son corps est aussi groggy que son esprit continue de tourner. Il ressasse, encore et encore, ce qu’il vient de se passer, et tout le reste. Elle se flagelle, s’accuse de tous les maux, se blâme d’être aussi peu efficace, de ne pas parvenir à réaliser un simple sort que sans doute son père aurait réussi… Et continue de s’enterrer ainsi durant toute l’heure, se qualifiant elle-même de sobriquets de moins en moins flatteur, pour en finir par se dire que la forme dans laquelle Flacone l’a maudite était particulièrement adaptée pour une cervelle d’oiseau comme elle.

L’heure, de ce fait, passe comme un rien. Elle ne sait plus vraiment si personne n’est monté jusqu’ici ou si sa seule présence en a dissuadé certains, mais le fait est que la garde arrive à son terme sans qu’ils n’aient d’attaque à déplorer. Quand Mills arrive, elle ne réagit pas, ne se tourne même pas dans sa direction, lui tournant résolument le dos. Elle a entendu, mais il lui faut un moment pour digérer. Pas pour comprendre, mais pour ravaler ses commentaires, lui dire qu’elle s’en fiche, ou encore lui demander naïvement s’il est certain que les zonards se lanceront à leur poursuite… Le fait est que la fatigue est toujours là, et qu’elle n’a plus envie de se battre. Elle a envie de tout autre chose. Se serrant contre le mur, elle laisse un peu de place à Mills pour qu’il s’asseye, et tapote doucement la place ainsi faite à côté d’elle. Elle attend, patiemment, que le tueur la rejoigne, toujours sans le regarder… Et, une fois qu’il est là, elle prend délicatement son bras et le serre contre elle, venant appuyer sa tempe entière sur son épaule. Elle pense qu’après qu’il l’ait touchée comme il l’a fait, ils ne sont plus à ça près, et là, elle a vraiment besoin… De quelqu’un. Elle serre, comme une enfant serrerait sa peluche un soir d’orage. « Je sais que vous avez déjà fait beaucoup pour moi, Mirror… » Elle commence, à voix basse. « Mais j’aimerai vous demander une dernière petite faveur avant que nous ne repartions chacun de notre côté, s’il vous plaît… » Elle serre son bras un rien plus fort, et relève le bleu de ses yeux vers lui. « Vous pourriez faire semblant, juste une minute, que nous ne sommes pas des étrangers l’un pour l’autre s’il vous plaît ? » Un ami, un amant, un frère… Une minute d’une relation qui ne soit pas superficielle, d’une relation qui ne soit pas conditionnée par le besoin et la suspicion… Une minute d’abandon, perdue dans la misère de l’heure et de l’endroit, un secret qui lui ferait du bien, une étincelle dans la nuit qui l’attend… Un rien de chaleur… C’est tout ce qu’elle veut. Elle garde les yeux résolument tournés vers lui, cherchant à lui faire voir que ce serait un bandage appliqué sur des blessures internes, béantes, qui la tueront bientôt si elles le restent…
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptySam 4 Avr - 13:47

Ne pas se laisser déconcentrer. Sinon c’est le danger assuré et le début de la fin. Je ne vois pas le bout de ce qui nous occupe, des problèmes qui s’élèvent devant nous. Il est clair à mes yeux que nous ne pouvons certainement pas nous targuer d’avoir le luxe de pouvoir simplement échanger, discourir, comme si les gens que nous pouvions rencontrer étaient simplement nos amis. Ce n’était pas ça qui allait nous sauver, cette forme d’angélisme à laquelle je ne pouvais pas adhérer. La méfiance et la prudence devaient être constantes pour fonctionner. Autrement nous passerions sans doute beaucoup trop de temps à dilapider ressources et énergie. Le nerf de la guerre dans ce nouveau monde, ce n’était pas tellement la nourriture, ou l’eau. Ce n’était pas l’énergie ou l’argent. Cela pouvait être la poudre, peut être. Ca et le talent à la survie. Mais non, finalement, c’était l’intelligence. Dans un système sans protection sociale, sans filet de sécurité culturel de quelque sorte que ce soit il n’y avait plus rien pour nous protéger à part nous-mêmes. Tous ceux qui restaient avec quantité d’attaches, de liens interpersonnels, tous ceux-là ne faisaient pas de vieux os. Ils finissaient par faire une bêtise au nom de la protection des leurs, et là les choses pouvaient considérablement s’aggraver pour eux. Combien avaient fini une balle dans la nuque au bord d’une route, jetés dans un fossé sans même une pelletée de terre pour les recouvrir ?


J’ai vu un peu d’espoir, avec la jeune survivante que j’avais aidé à secourir. Mais l’espoir n’était certainement pas l’idéal à atteindre, le nectar des mortels qui erraient en ce monde. L’espoir était un poison, car il ne pouvait plus nous nourrir que de faux espoirs au milieu d’un chaos qui n’avait cure du moral des gens et qui continuait de frapper, encore encore et encore, sans le moindre discernement. Je réduis à néant tout ce que le contact avec cette jeune femme avait pu faire naître chez moi. Toutes ces faiblesses dérisoires qui m’éloignaient de mon seul vrai but. L’espoir est un mensonge, l’avenir est un danger.


Je m’assieds près d’elle quand elle me l’indique, toutefois. Suis-je capable de repousser la tentation obsédante de cette même faiblesse, plusieurs fois de suite ? Rien n’est moins sûr. Mon bras est pris par les siens, et elle se serre contre. Je soupire, doucement. Je ne lui en veux pas, de croire que c’était nécessaire. De considérer que c’était apaisant. Ca l’était. Mais était-ce souhaitable pour autant ? Sa petite voix coupe la nuit silencieuse, et me demande une faveur avant que nous sortions. Elle serre plus fort mon bras, ce qui me fait me tourner vers elle, et son regard azur me capte encore. M’électrise. Je me tends doucement vers elle. Nous sommes encore si proches, mais j’analyse tout ce qui me passe devant les yeux.


Tout ça est une très mauvaise idée.


Je m’avance un rien vers elle. Hésitant. Me demandant ce que ça me ferait d’embrasser une femme que je n’ai pas payée. Une fille qui n’est peut être qu’une victime, ni une profiteuse de guerre ni une tueuse. Je soupire, pose le front contre le sien, abattu par la fatigue et par cet espoir qui va et vient, qui est d’une douleur lancinante à chaque instant.



| Mais des étrangers c’est ce que nous sommes, Miss Daisy. Je ne sais pas qui vous êtes. Je ne sais pas ce que vous avez fait. Je sais que vous êtes une tueuse, et moi aussi. Mais ça ne suffit pas à faire de nous des amis. |


Je tire doucement mon sac de mon masque. Mes doigts gantés de cuir renforcé en frôlent l’armature. Je soupire encore, traçant le contours des marques de coups sur mon masque.


| Je suis le fossoyeur du destin, Miss Daisy. Je suis Mirror. Si vous ne me connaissez pas, c’est que j’ai bien fait mon job. |


L’un de mes doigts vient se poser sur sa bouche, comprenant qu’elle risquait de commettre finalement une erreur. Je ne sens pas son contact au travers du gant, mais je sens la pression et la chaleur de son corps.


| Non. Ne me dites pas qui vous êtes vraiment. Une partie de moi voudrait le savoir. Mais si je le sais… |


Je baisse les yeux, et réenfile mon masque.


| Si je le sais, je risque d’avoir à vous chercher et de vous tuer. Je ne veux pas avoir à faire ça si je peux l’éviter. | dis-je d'une voix éteinte, en train de lentement resserrer les lanières maintenant mon masque.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptySam 4 Avr - 18:27


Zatanna a atteint ce stade de fatigue où la morale se fout de tout. Où, plus que de se foutre de tout, elle est remise en question à chaque coin de rue, tout le temps, pour tout et n’importe quoi. Zatanna est comme une enfant qui tourne, bras ouverts, visage offert au soleil. Elle tourne, tourne sans arrêter, sans point d’horizon… Et est sur le point de s’écrouler, prise de vertige. Mirror est une main tendue dans ce maelstrom de sons, de couleurs et de formes qui se mélangent, un appui qui lui permettrait de garder pied, le temps qu’elle arrête de tourner et puisse retrouver son point d’horizon… S’il le voulait. Zatanna veut désespérément qu’il le soit, parce que ce souvenir de sa gentillesse, de sa prévenance, il est marqué au fer rouge dans sa peau, ou plutôt il l’a collé dans sa cuisse. Elle le croit quand elle dit qu’il a tué, et sans doute bien plus souvent qu’à son tour, mais dans ce monde devenu si laid, tout ça n’est qu’allégations et le visage de ces allégations ne la touche pas comme il le devrait… Elle devrait être horrifiée, prendre ses jambes à son cou, ou mieux encore… Le mettre hors d’état de nuire. Elle n’en a pas la force, elle le sait. Mais plus que la force, l’envie lui manque. Finalement, ces mots « j’ai tué quelqu’un » sont devenus tellement banaux dans la zone de non droits dans laquelle ils vivent… Ce sont des mots que le vent emporte aussi vite qu’ils ont été prononcés, leur enlevant toute substance, refusant à Mirror l’aura de tueur qu’il mérite. Pour la magicienne épuisée, ces meurtres sont très abstraits, d’une abstraction qui ne peut pas lutter avec les souvenirs très concrets, très réels, qu’il a imprimés dans son corps. Que Mirror le veuille ou non, Zatanna portera avec elle la douceur de ses soins, la pénibilité du recollage système D, mais surtout l’attention qu’il lui a donnée, les ressources qu’il a sacrifiées pour elle, et sa façon d’avoir sauté dans l’adversité alors que, c’est évident maintenant, il connaissait parfaitement les risques.

Alors, s’il est évident que la sorcière devrait, à tout le moins, garder ses distances avec ce curieux personnage, la fatigue l’aveugle, lui pose des œillères, l’enferme dans un caprice. Il aura beau répéter qu’il est dangereux, elle ne voudra pas l’entendre. Troquer un souvenir très frais, palpable, pour de l’hypothétique, elle ne peut plus. Il y a déjà beaucoup trop d’éthéré dans sa vie. Elle marche sur un fil au quotidien, suspendu au-dessus d’une abîme insondable. La main qu’il lui a tendue est, elle, une certitude. Elle veut la garder aussi longtemps que possible, même si ça implique se mentir à soi-même, lui mentir à lui, et même aller plus loin, même si ça implique de s’enfermer dans un mensonge. Elle a besoin de souffler, Zatanna, ne serait-ce qu’une heure. Elle a besoin qu’on la laisse souffler, chose que le monde entier semble lui refuser. Alors elle s’accroche à ce bras, comme une noyée à sa bouée de sauvetage, parce qu’elle sait qu’elle va devoir le rendre, et se retrouver seule à nouveau au cœur de la tempête… Elle ne veut que quelques minutes de plus de répit, juste quelques minutes.

Si ses besoins semblent différents de ceux de la magicienne, Mirror lui concède son caprice. Il ne reprend pas son bras, pas tout de suite du moins, et accepte de se tenir à moins de vingt centimètres d’elle. Elle ne résiste pas au besoin de le dévisager, avec, lui semble-t-il, la même intensité que lui semble mettre à la dévisager. Elle prend le temps que dure leur regard pour l’observer vraiment, du bleu de ses yeux, de la longueur de ses cils, des quelques rides qui marquent son visage aux contours fins… ça ne doit sans doute pas lui servir par les temps qui courent, mais Mirror est un bel homme, un homme dont l’adolescence est loin, et l’insupportable immaturité qui va avec aussi. Il y a beaucoup à dire de cet homme, elle a l’impression, Zatanna. Peut-être qu’elle se trompe ? Elle s’en moque, là tout de suite, et se contente de fermer doucement les yeux quand leurs fronts se rencontrent. Delicate, l’une de ses mains relâchent l’emprise qu’elle exerçait sur son bras et vient trouver son cou, son pouce allant et venant alors en aériennes caresses près de sa mâchoire. Il semble à la magicienne que les réalités se sont inversées, que la laideur du monde est un cauchemar et que ce qu’elle expérimente maintenant est la réalité.

Dans le cocon de cette illusion, la voix de Mirror semble très lointaine à Zatanna, comme étouffée, comme si elle l’entendait depuis sous la surface d’un lac. Elle écoute distraitement ce qu’il essaie de lui dire. Peut-être plus encore que son corps, son esprit est fatigué. Les deux sont en lutte permanente, et là, c’est le corps qui gagne. L’esprit se nourrit d’espoirs, de « et si » et de « dès que », et il parvient à tirer le corps dans la direction de son choix… Mais là, quand le confort, si maigre, est concret, l’âne qu’il est refuse de bouger. Pragmatique, il refuse de troquer un « tiens » pour deux « tu l’auras ». Elle aimerait bien le lui dire, Zee, qu’ils s’en foutent de son nom, que demain ils l’auront tous les deux oubliés… Que les dates et les noms, ça s’efface, les chiffres et les lettres s’envolent, les phrases et les pièges s’éventent… Mais il ne le lui en laisse pas l’occasion. Son doigt ganté trouve sa bouche et la réduit au silence. Elle comprend, à son objection, qu’il pensait qu’elle finirait par le lui dire, son nom. Non, elle n’a pas besoin de se présenter ni de reconnaissance… Zatanna, elle a juste envie d’exister. Sous un nom ou l’autre, ça n’a pas d’importance pour elle.

Quand il va pour remettre son masque, elle vient suspendre son geste en posant la main sur la sienne et vient accrocher son regard une dernière fois. « Celle que je suis pour vous ne doit pas nécessairement être celle que je suis pour les autres… Pour moi, vous ne pourrez sans doute jamais être le même… » Elle lui sourit, gentiment, vient poser un baiser sur sa joue, sa main sur l’autre joue, près de ses lèvres pour éviter que son front ne se heurte contre le masque, et finit par totalement lui rendre sa liberté. Après un dernier regard, elle se lève, frotte un peu son pantalon, et retourne dans le bureau pour aller s’asseoir près de la baie vitrée. Dos appuyé contre le mur, elle rassemble ses genoux contre elle et laisse doucement aller son front contre la surface vitrée. Le froid de la glace lui fait assez de bien pour qu’elle en ferme les yeux un instant, avant de les rouvrir pour laisser son regard se perdre mollement dans les ondulations de l’eau du canal, sous eux.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyDim 5 Avr - 0:19

Je ne sais pas ce que je ressens. Je ne sais pas vraiment ce que je dis ou ce que je fais, mais j’ai encore une certitude pleine et entière, intacte. Celle de faire en sorte de survivre et d’accomplir ma mission, quoiqu’il m’en coûte. C’est une situation étrange. Une sorte de syndrome de Stockholm ? Je n’avais jamais cru à ce genre de coup de foudre psychologique. Il y avait les maîtres manipulateurs -des survivants-nés- et les autres. Un point c’est tout. Inutile de chercher beaucoup plus loin.


La jeune femme s’accroche à mon bras comme à la vie.


Combien de fois avais-je vu ça dans ma vie ? Au milieu des pires endroits du monde. Des filles auprès de leurs pères. Des maris et leur femme. Des gamins et leurs parents. Je me rappelais de l’Afghanistan et des Killing Zones. Je me rappelais de la Syrie et de la Lybie. « Pas de témoins, Capitaine Mills ». Je me rappelais de la Task Force X, de ces gens dans la rue, pris entre les émeutiers et nous. Tous le visage baigné de larmes et le regard plein d’espoir lancé droit vers les étoiles avec ce cri d’horreur silencieux ; qui pour nous sauver ?


Personne, et surtout pas moi.


Je suis un guerrier dans un pays qui n’a plus fierté ni honneur, plus rien pour se donner bonne conscience, pour donner du sens aux horreurs traversées. Alors que nous restions proches, plus que deux inconnus devraient l’être, la jeune femme lâche un rien la pression exercée sur mon bras et glisse une main vers mon cou et son doigt caresse l’arête de ma mâchoire. Je ferme les yeux. Je soupire, un long souffle exhalé. Je me sens tellement fatigué. Je… Je me sens tellement bien, apaisé. Comme si je pouvais enfin mourir sans regret.


Non. L’espoir, c’est dangereux. L’espoir, ce n’est pas pour moi. Je déglutis difficilement, ne pouvant m’empêcher d’accepter et d’apprécier le contact donné ainsi, gratuitement, sans attente de retour. Sa main m’empêche de finir d’enfiler mon masque. Je la dévisage à nouveau. Quel genre de pouvoir avait sur moi la brunette ? Elle m’explique que je ne dois pas être avec elle le même que j’étais pour les autres. Je la dévisage tristement. Heureusement pour elle. Sinon, elle serait déjà morte.


Le baiser laisse son empreinte sur ma joue mal rasée. Chaude, un rien humide. Son odeur sur ma joue décharnée.


Je me la frotte, doucement, lentement, main dégantée, alors qu’elle est partie depuis longtemps.


Ce monde n’a plus aucun sens. Je reste là, à guetter l’escalier depuis le couloir. Armes à portée de main. Sac non loin. La belle, éloignée, qui regarde le fleuve. Plus rien n’interrompt le silence en dehors des cris d’un bébé, en bas. Je me rappelle des pleurs de Jeni et Tabi, à cet âge-là. Ils nous réveillaient en déchirant la nuit. Je me frottais une fois encore les yeux remplis de larmes pour en chasser toute l’humidité, et remettre mes gants, m’essuyant le nez d’un revers de la manche. Je ne peux pas m’empêcher de jeter quelques regards à la dérobée vers Miss Daisy.


Je la couve d’un regard protecteur. Honteux. Je me rends bien compte que je la désire. Mais plus que sa féminité, c’est sa douceur qui me provoque des élancements douloureux. Je pourrais abandonner ici mes armes contre une étreinte, contre un peu de sa chaleur. Sans rien de plus. Mais je ne peux pas. Je ne dois pas. Je finis de serrer le masque autour de ma tête. Je me sens entier. Protégé. Je peux réfléchir. Le souffle un rien grave, étouffé sous la protection du kevlar renforcé de l’ersatz de miroir.


J’ai encore et toujours une mission à accomplir. La monte bipe, à mon poignet. Je me relève. M’étends. Contrôle mes armes, mon sac, et m’avance vers la jeune femme. Je lui tends la main gantée pour l’aider à se relever. Je la hisse sur ses jambes et reste là, face à elle. Contre elle. Elle ne voit plus de mon visage que les yeux verts de gris qui en transpercent les orifices oculaires du masque. Désespérément en quête de quelque chose d’intelligent à dire, perdu dans l’azur de ses yeux. Mais je baisse la tête, honteux, épuisé.



| Je vous amène jusqu’à Midtown, ça vous va ? Je veux dire, l’île principale. D’autres milices qui ne sont pas à notre recherche nous protégeront malgré elles. |


Je relève les yeux quand même, finalement.


| Sans savoir qui vous êtes, ce qu’on vous veut, ni où vous créchez, comment vous reverrais-je ? | J’hésite | Je veux dire, en d’autres circonstances ? |


Trop de sang sur les mains ce soir. J’avais tué une parfaite innocente. Un témoin. Et combien de types abattus froidement, après l’action passée ? Double-tap, tête-poitrine, tête-poitrine. Ca me rongeait, mais je savais que j’allais continuer. Et je ne pouvais pas vouloir quelque chose d’aussi différent en plein bain de sang.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyDim 5 Avr - 10:42


Le temps, relatif, s’écoule au rythme du fleuve, à la fois très court et très lent. De temps à autres, Zatanna relève les yeux vers Mirror qui lui tourne le dos, et les rabaisse rapidement. Elle se pose des questions, conjecture. Il a l’air un peu plus vieux qu’elle, et sa détresse semble immense… Plus que des êtres chers, il a perdu des piliers essentiels à sa vie, à sa santé mentale. Bien que leurs réactions n’aient rien à voir, la peine qu’elle a vu dans ses yeux lui rappelle celle qu’elle a pu voir, à une rare occasion, dans ceux de Bruce. Cela étant, Bruce porte les stigmates d’un traumatisme d’enfant, traumatisme au-dessus duquel il n’est jamais passé. La colère de Mirror semble être différente, ne pas se teinter des mêmes nuances. La perte d’une femme ? Celle d’un enfant ? Les deux ? Elle soupire discrètement. Cette vie n’épargne personne, tire tout le monde vers le bas. Enfin presque. Quelques bastions tiennent encore, comme ils peuvent, et tentent de former des communautés qui reposent sur l’entraide et la complémentarité. C’est d’ailleurs dans l’un de ces bastions que Zatanna prévoit de se réfugier, juste après s’être cachée pour se soigner. En dehors de son pied de biche, elle n’a pas d’arme. Elle est à peu près certaine qu’ils l’accueilleront sans poser de problème. Partir, cependant, sera peut-être plus compliqué. Les bastions ne sont pas des prisons, mais ont tout de même des saveurs d’enclos, avec leurs hautes murailles, nécessaires à la survie et à la tenue face aux sbires des Boss. Les entrées et sorties sont contrôlées, et avant de pouvoir aller à votre guise, et de bénéficier de la confiance des habitants, vous deviez faire vos preuves. Logique. Elle leur dirait, de toute façon, qu’elle n’est que de passage et cherche juste un asile quelques jours, le temps de se reposer… Reste à voir s’ils seront prêts à l’aider ou pas, dans ce monde où les ressources sont dramatiquement limitées.

Le bip de la montre de Mirror, qui résonne dans le couloir, la tire de ses pensées. Son corps, groggy, n’est que douleur. Elle étend lentement ses jambes, grimace en sentant sa peau tirer à cause de la colle, et glisse une main dans sa nuque, qu’elle masse doucement. Yeux fermés, elle renvoie sa tête en arrière, tente de dénouer quelque peu ses cervicales… Et rouvre les yeux sur la main tendue de Mirror, près d’elle, prêt à la relever. Ses doigts viennent serrer ceux du mercenaire avec gratitude. S’aidant de lui autant que prenant appui sur la vitre, elle se redresse, les muscles raides, et, une fois debout, lève le bleu électrique de ses yeux vers le miroir… Sans vraiment le voir. Elle, elle voit les yeux de Mirror et le visage sous le masque. Et elle garde, sans s’en rendre compte, les doigts du criminel dans les siens. Elle hoche la tête en signe d’assentiment à sa suggestion. Elle n’a pas de meilleure idée, et au stade où elle en est, n’importe où est aussi bien que n’importe où. Tout ce qu’elle espère, c’est trouver un endroit tranquille où se débarrasser de ses blessures… Et dormir pendant trois jours.

Après cette question, Zatanna se demande s’ils se sont tout dit. Elle aimerait que non. Cherche quelque chose de malin à partager, n’importe quoi pour qu’ils échangent encore un tout petit peu avant de se dire Adieux… Et, forcément, se laisse surprendre, visiblement, par la question d’un Mirror si hostile à un rapprochement, même feint. Pourtant, la surprise passée, la magicienne sourit avec douceur et un rien de malice. « Un rendez-vous… C’est comme ça qu’on faisait avant. » Elle lui souffle, amusée, ses doigts serrant légèrement les siens. « Le sud de Palisades ? Il y a la colline dont la vue donne sur Gotham… Je pense que nous y risquerons moins de mauvaises rencontres… Mais si vous avez une meilleure idée, je prends. » Elle lui sourit plus largement, un peu naïve, avant de relâcher ses doigts et d’aller prendre son propre sac, ainsi que le pied de biche… Et, ce faisant, elle se congratule un peu, se flatte d’être parvenue à traverser tout ça en résistant à l’appel de la magie. Bientôt, ses blessures seront parties, mais Zatanna se flatte de les avoir endurées, presque sans broncher. Mais, plus encore que la libération de son corps de la douleur, c’est la perspective que ce ne soit pas un adieux qui les attendent, Mirror et elle. Ils vont se revoir, et elle percera le mystère qu’il est… Enfin… ça, c’est en admettant qu’il vienne au rendez-vous, et ne change pas d’avis entre temps…
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyLun 6 Avr - 17:47

La nuit avait été longue. Elle avait été dure. J’en serais quitte pour une nouvelle tâche à mon honneur et encore un peu plus de sang sur ce qui me maculait déjà les mains. Des regrets, aussi. Sans doute. Il n’était jamais bon temps d’en avoir. Et pourtant j’en nourrissais déjà. Je ne savais pas vraiment à quel propos. Qu’espérais-je de cette nuit ? La raison aurait été d’abattre aussi la jeune femme, la jolie brune que j’avais sortie de tout ce merdier. Mais je n’étais sûr de rien, désormais. Aurais-je réussi à fuir par mes propres moyens ? Ce n’était pas acquis, même si je savais être rapide et discret, silencieux et mortel. Je pouvais tomber sur un os. Plier sous le nombre. Prendre la mauvaise décision à l’instant fatidique ou pire, avoir le mauvais réflexe. Il y avait aussi simplement les fautes à pas de chance, les trucs bêtes et stupides qui faisaient baigner le sol de votre propre sang. Et regrets de quoi, alors ?


Regrets de ne pas avoir passé la nuit à me baigner dans l’océan de ses yeux, dans les nuances ténébreuses de ses pupilles ? D’avoir eu cette peau, si douce et si chaude, sous la main plus souvent que chairs dévastées et sang coagulant ? C’était étrange, comme sentiment. Cela ne faisait que ressentir les élancements douloureux que je ressentais au travers de mon âme et des lambeaux qu’il m’en restait.


Le bip de la montre change tout, quant à lui.


Il balaie les doutes et les incertitudes. Il remet les choses dans leur contexte ; nous sommes deux fuyards qui doivent encore être traqués à cause d’un bain de sang commis la veille, maintenant. Ses doigts restent accrochés à ma main, et il n’est pas question de la repousser. Pourtant, je ne suis pas à l’aise. Pas alors qu’elle a raison ; c’est un « rendez-vous ». Au sens français du terme. Une forme de « rendez-vous » en tout cas. Difficile de dire ce que je lis dans ses yeux, et ce qu’elle lit dans les miens. Je me laisse encore avoir par ses yeux, et je lâche, derrière sa proposition.



| Non. Pas le sud des Palisades. |


J’y habite en son cœur. Mais ça, elle n’est pas forcée de le savoir. Je ne suis pas prêt à dévoiler ma base arrière, et le décor encore familial, à une femme qui n’est pas prête à me donner son nom.


| Près de l’ancien théâtre des Palisades. On voit la baie depuis le toit. |


C’est un excellent point de tir pour une mitrailleuse légère ; elle couvrirait toute la rue en cas d’incursion depuis la ville. Mon esprit s’embrume d’un méli-mélo de pensées guerrières ou sensuelles, de dérives autorisées par l’abandon de toute forme d’ordre et de loi. La belle s’éloigne et reprend ses affaires.


| Dans cinq jours. On sera dimanche. |


Le dimanche, je ne travaillais jamais. D’ordinaire, j’émergeais difficilement des libations de la veille dans un tripot sordide, et je préparais la semaine suivante de contrats ou d’assassinats pour le compte du miroir. Je lui fais signe de me suivre et regarde sur le coin de l’escalier en contrebas. Nous mettons quelques minutes à sortir, temps terriblement lent pour prendre le temps à chaque fois de vérifier s’il n’y a pas une embuscade quelconque à un endroit ou à un autre du couloir.


| Je tiens à être honnête, Miss Daisy. Ce que je ramènerais, à boire ou à manger, aura été payé par le sang. Vous comprenez ce que je veux vous dire ? |


Le sang… Combien de gens aurais-je encore liquidé, d’ici là ? L’air frais fait voleter les mèches récalcitrantes de mes cheveux et me fait du bien. Pourtant, en mon for intérieur, le mal continuait de pulser à l’idée de tuer encore.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyLun 6 Avr - 21:54


Un penny pour tes pensées… Si elle ne le lui aurait pas dit une fois, elle ne le lui aurait pas dit cent fois, ce soir, à Mirror. Il y a l’air d’y avoir tout et son contraire, sans sa tête. A la fois un calme olympien, on sent sans mal le conditionnement de l’entraînement militaire, la précision de gestes répétés des centaines de fois, au point que les muscles, une fois la série lancée, peinent à l’arrêter… Chaque fois qu’elle voit ce genre de chose, Zatanna pense à Pavloff et à ses chiens, et ignore si elle admire d’avantage les hommes qui s’astreignent à la discipline nécessaire à l’atteinte de ce niveau, ou si le caractère malléable de l’esprit et du corps humain la fascine d’avantage… Elle-même, a-t-elle des réflexes de ce genre ? Sans doute… Mais elle n’a pas l’impression de connaître le genre de calme que semble connaître Mirror, parfois. Ce qu’elle qualifierait d’une froide précision. Zatanna, elle échafaude rarement des plans ou des stratégies qui, dans le meilleur des cas, restent excessivement sommaires. Zatanna, elle est maligne pour tirer profit de l’environnement, pour le plier à son imagination… Elle est trop débridée pour pouvoir anticiper. Les scénarios sont trop nombreux à se bousculer dans sa tête, et elle ne parvient pas à les réfréner. Non, Zatanna, elle, elle y va et… Elle improvise avec ce qu’elle a. A final, là où Superman ou Batman peuvent compter sur leurs acquis, sa plus grande force, à elle, c’est sa rapide adaptabilité, impulsive, brute…

Mirror semble être à la fois un livre ouvert et un nuage de brume. Elle a l’impression, quand elle le regarde dans les yeux, de le comprendre pour avoir l’impression extrême inverse quelques secondes plus tard. Peut-être qu’elle se fourvoie, à propos de lui, mais elle est persuadée que non… Ses réactions sont trop humaines, trop spontanées dans un comportement parfaitement étudié pour être des feintes. Il a l’air de souffrir mille morts, et c’est sans doute pour ça qu’elle peine à le blâmer pour les crimes qu’il avoue… Outre la victime, il a l’air d’en souffrir plus qu’elle encore. Zatanna, elle sait ce qu’il y a après la vie, alors elle sacralise sans doute beaucoup moins cette courte période de transition. Mais Mirror, non… Il ignore que c’est bien plus difficile pour ceux qui restent. Il ignore si en tuant, il ne libère pas des âmes torturées par la vie… Lui-même ne se sentirait-il pas soulagé d’embrasser la mort ? Curieuse question à lui poser. Elle soupire discrètement. Cet homme est une énigme qu’elle veut résoudre, mais plus encore, bien qu’elle se voile la face, elle se cherche des excuses pour justifier qu’elle veuille le revoir… Parce que c’est contraire à tout ce qu’elle a été avant la chute, et qu’elle se rend compte, sur le point de franchir ce pas, qu’elle a changé. Elle a cru que non, elle a espéré que non… Mais ça lui éclate, alors qu’en son fort intérieur, elle redoute qu’en ayant proposé un mauvais endroit, il ne veuille en chercher un autre et annule. Elle ne veut pas qu’il annule. Elle a goûté à un rien de confort grâce à lui, et elle a désespérément envie de retrouver cette sensation… Même fugace, même fausse, même s’il ne la lui désigne pas à elle… Pour elle, ça aura presque la même saveur… Presque, parce qu’il est toujours douloureux de recevoir des sentiments destinés à d’autre, mais la magicienne a appris à vivre avec cette douleur, à prendre ce qu’on lui donnait et à dire « merci », ou à ne pas prendre et à passer son chemin. Chercher à plier l’autre à sa volonté, paradoxalement, n’est pas pour elle, bien que la tentation… Elle l’ait déjà eue.

Il propose l’ancien théâtre, et la vue sur la baie, rendant instantanément son sourire à Zatanna, qui hoche la tête en signe d’assentiment, et réitère la manœuvre pour marquer son accord en ce qui concerne la date. « Le rendez-vous est pris dans ce cas. 18H30 ? » Elle confirme, les yeux pétillants, avant de le suivre en silence pour qu’ils s’engagent dans le couloir. Ses manœuvres, elle n’y excelle pas, mais elle les connaît. Elle n’en est pas à son coup d’essai de mission d’infiltration ou d’exfiltration… A la différence que d’habitude, elle peut utiliser sa magie pour se tirer d’affaire si besoin… Au moins, Mirror sait ce qu’il fait, elle cale donc son rythme, son pas et son positionnement sur le sien… Autant qu’elle le peut, avec ses diverses blessures. Elle a l’impression que ça leur prend une éternité de sortir de cet endroit, mais ils finissent par atteindre l’extérieur, et sans perdre une seconde, jettent un œil aux environs. Zatanna est prête à quitter le couvert de l’endroit pour suivre le plan, mais la réflexion de Mirror l’arrête. Elle se tourne vers lui, le considère avec intensité pendant l’un de ces temps relatifs, de ceux qui semblent durer des heures mais qui pourtant ne représentent que deux secondes… Et lui sourit gentiment. « Dans ce cas, laissez-moi m’occuper de la nourriture et des boissons… Vous n’aurez qu’à amener quelque chose à vous. Un souvenir que vous voudriez partager avec moi -pas d’inquiétude, je vous le rendrai, promis… » Elle le gratifie d’un clin d’œil. « … Ou bien ce qui vous semblera approprié… » Sa tête s’incline légèrement, et elle poursuit, un peu moins fort. « Ainsi vous n’aurez pas à vous sentir coupable au moment de dîner… » Elle l’espère, en tous cas… Parce qu’elle a toujours cette impression, quand elle le regarde, de voir le reflet de sa propre fatigue en lui… Et que, comme elle, ça pourrait lui faire du bien de souffler quelques heures…
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyMar 7 Avr - 16:04

C’était étrange comme pensée, comme organisation, comme dénouement. Il avait fallu cette drôle de rencontre pour que je manque d’exploser. Littéralement. Pour que ma psyché manque de s’effondrer sous le poids de ses propres contraintes et contradictions, que je me sente tiraillé jusqu’à l’écartèlement moral, avec des sensations quasi physiques. Avec la mort et la migraine du début de la nuit, je me sentais pantelant. Ca plus les blessures, je n’étais pas le plus en forme qui soit. Je me sentais vidé. De toute énergie, absolument chaque parcelle de tout ce qui en mon for intérieur pouvait m’aider et m’avancer. C’était comme si un espèce de démon des légendes m’avait simplement aspiré toute force vitale, que cela ait des conséquences physiques ou mentales, dans les deux cas j’étais aussi vide que possible.


Je ne savais pas non plus dans quelle mesure c’était ma faute, celle de la fusillade et du bain de sang à bout portant d’hier, au corps à corps, et dans ce qui était du fait de la jeune femme et de la forme de proximité, voire de tendresse, qu’elle avait inexplicablement pour moi. Je ne croyais pas à ces conneries psychologiques sur le syndrome de Stockholm ou ce genre de trucs, mais je ne me sentais pas vraiment en capacité de pouvoir disserter sur le sujet. Loin de là, même. Nous continuons à marcher en silence. Je me sens vanné, mais je reste aux aguets. Si nous sommes pris par nos adversaires, ce sera rapide et sanglant, et il sera difficile alors d’estimer ce que nous pouvons réaliser l’un et l’autre comme prouesses pour nous en tirer. Ca se jouerait sans doute au pur réflexe, entre des portes-flingues éreintés par leur nuit mais aussi par leurs recherches.


Je hoche la tête sans croiser son regard, quand la jeune brunette confirme 18h30. J’acquiesçais, d’abord en silence, avant de formuler mon assentiment. Un rien conditionné par la rigueur des événements et de ce à quoi nous devions tous faire face.  



| Plutôt 21h30. Il fera nuit noire, normalement. Je crois. On pourra y arriver avec moins de mal. Et la baie est aujourd’hui plus belle de nuit que de jour. |


Cela me laisserait le temps de briquer mon équipement et la maison, et de trouver de quoi ramener… Mais si je m’arrête quand la jeune femme le fait. Elle me jauge, je le vois bien. Elle doit être en train de regretter, déjà. Mais je ne relève pas. Elle m’explique pouvoir s’occuper de la nourriture et des boissons. Elle me propose un souvenir. Je ne me laisse pas démonter dans l’intensité de notre échange visuel et je n’en démords pas.


| Non, je peux m’occuper de tout. Mon travail me fournit largement ce qu’il faut, et pas que pour une personne. Je voulais juste que vous soyez au courant. Vous n’avez à vous en charger à ma place que si vous n’acceptez pas cette provenance, que vous avez parfaitement comprise… |


Puisqu’à défaut d’être prudente ou raisonnable, elle était intelligente.


| Je suis ce que je suis. Je fais ce pourquoi je suis fait. Je ne me sens pas coupable… |


Ou plutôt si, mais ça allait avec la mission. Et je savais très bien que je recommencerais. Dès demain, si je pouvais.


| Mais je ne veux forcer personne à l’assumer pour moi. |


Nous sommes arrivés au point où nous devions nous séparer. Je m’arrête et la regarde ; nous sommes arrivés jusqu’ici cahin-caha, mais encore en vie.


| Au revoir, Miss Daisy. Portez vous bien, et faites attention à votre tête et à vôtre côte. D’accord ? |


Que dire de plus ? Je me sentais si vieux, si fatigué, et tellement décalé par rapport aux gens qui m’entouraient.
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MessageSujet: Re: Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé]   Don't Walk Away [Intrigue I - Terminé] - Page 2 EmptyMar 7 Avr - 16:42


Elle n’est pas idiote, Zatanna. Elle voit bien qu’il lutte bec et ongle pour imposer sa vision des choses, pour prendre les décisions, même si elles ne vont pas dans son sens. Elle continue de le regarder, quand il décline son offre de s’occuper de tout, et retient un soupir. Elle pensait avoir été claire, pourtant… En lui disant qu’il était probable qu’elle ne le verrait jamais de la même façon que les autres le voient… C’est impossible. Jamais des meurtres et des assassinats abstraits ne pourraient remplacer dans son esprit le souvenir très concret de ce qu’il a fait pour elle. Son biais cognitif le concernant, si pas figé, jouait grandement en sa faveur. Mirror ne l’avait pas seulement sauvée… Il l’avait rafistolée, et à aucun moment n’a cherché à profiter d’elle, ni de la magicienne, ni de la femme. Zatanna ignore quelle part joue là-dedans la loi des contraires, mais paradoxalement, elle ressent bien plus l’envie de se donner à quelqu’un qui comme Mirror qu’à n’importe qui d’autre en ce moment… Peut-être parce qu’il ne l’attend pas ? Mais en veut-il, seulement ? Elle finit par baisser les yeux, et hocher la tête en signe d’assentiment, autant concernant l’heure que pour ce qu’il propose. Aussi difficile que ça semble à concevoir pour lui, la magicienne s’y conforme sans problème, preuve manifeste de plus que sa morale est dans la tourmente. Elle ne parvient plus à trouver le courage d’être ferme, pas après avoir vu les errances des uns et des autres. On est persuadé d’avoir trouvé le pire truand de la zone de non-droit, juste à temps pour qu’un autre se révèle encore pire… Einstein disait qu’il n’était pas certain de la non-infinité de la bêtise humaine. Zatanna, pour sa part, croit non seulement que la bêtise est infinie, mais aussi que l’individualisme prévaut sur tout, à cette ère. Les temps de sacrifice de soi pour le bien de la tribu est révolu. Aujourd’hui, il n’y a que le « moi » qui domine, beaucoup trop fort pour ne pas faire, au moins un peu, plier la magicienne sous son poids.

Arrive finalement le temps des au revoir, peut-être des adieux. A ce stade, Zatanna n’a aucun moyen de savoir s’il sera là, à 21h30, ou s’il tentera de lui tendre une embuscade. Elle fera un tour de reconnaissance, discret, de la zone avant de se montrer, ou quelque chose du genre pour ne pas se rendre compte après coup qu’ils sont dix, et qu’elle est seule. Elle est pleine d’espoirs et de doutes mêlés. Qu’il le veuille ou non, elle garde et emporte avec elle le souvenir de sa prévenance, et la spontanéité de son aide. Elle se souviendra du réconfort qu’il lui a donné, même si c’était du bout des dents et à son corps défendant. Elle espère simplement ne pas l’avoir trop chamboulé dans un premier temps, trop pour lui donner envie de céder à l’élan de la revoir. Sur le point de se séparer, à vient à nouveau le prendre dans ses bras, et serre, faisant « oui » de la tête à sa recommandation. « Promis… Et vous aussi. Rendez-vous dimanche. » Elle se recule, lui sourit un peu, et commence à partir de son côté, d’abord à reculons, avant de se tourner dans le sens de la marche. Elle se force à avoir l’air droite, et solide, et se met d’ores et déjà à la recherche d’un endroit tranquille où faire disparaître toutes ces sal****ies de blessures qui l’empoisonnent… Elle ignore ce qui lui réserve la soirée de dimanche, ni même la semaine qui la précède. Elle espère juste pouvoir vivre jusque-là pour le voir…
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